ENTRETIEN. Accaparements de terres agricoles : « Un risque pour la nature et le travail rural » | Land Portal

Source: Ouest France

Date: 03/09/2020

Six mille hectares de terres agricoles pour 40 millions d’euros ! La vente, révélée début août, a secoué la région de Thuringe, en Allemagne. L’est de l’Europe est victime d’un phénomène d’accaparement de terres par de gros investisseurs étrangers au monde agricole. Entretien avec Yves Petit, directeur du Centre européen, université de Lorraine.

 

L’est de l’Europe est victime d’un phénomène d’accaparement de terres par de gros investisseurs étrangers au monde agricole. Le dernier exemple concerne l’Allemagne et le discounter Aldi. Entretien avec Yves Petit, directeur du Centre européen, université de Lorraine.

Le phénomène de concentration des terres dans la main d’investisseurs a-t-il baissé en Europe ?

Nous n’avons pas de nouvelles études disponibles, mais l’accaparement de terres agricoles européennes par des groupes financiers se poursuit, à l’image d’Agricost Braila, la plus grande ferme de Roumanie (56 000 ha), passée sous le contrôle du groupe al-Dahra, d’Abou Dhabi, en 2018.

Quels sont les pays de l’UE les plus concernés ?

Ceux de l’Europe de l’Est, la Pologne, la Hongrie, la Slovaquie, la Roumanie, et l’Ukraine, en dehors de l’Union. Mais la France aussi est concernée, avec, par exemple, les 1 700 hectares achetés dans l’Indre par un groupe chinois, en 2019. En Roumanie, 10 % des surfaces agricoles (soit un million d’hectares) sont déjà entre les mains d’investisseurs de pays tiers, dont seulement 20 à 30 % sont européens. La Chine et les pays du Golfe sont à la pointe.

Quelles conséquences à cette financiarisation de l’agriculture ?

Elles sont de deux ordres. Cela conduit à une industrialisation des terres agricoles, avec de grandes monocultures, dont beaucoup sont destinées à devenir des agrocarburants. Elle ne tient pas compte des objectifs climatiques ni de la conservation de la nature. L’autre conséquence est une paupérisation des hommes qui travaillent la terre ; ils deviennent des salariés pauvres, aux mains de grands trusts.

N’existe-t-il aucun moyen de lutter ?

Les politiques des États membres, pour freiner l’accaparement ou la spéculation sur les terres, se heurtent parfois à la libre circulation des capitaux, une des libertés fondamentales de l’UE. Quant aux grands investisseurs de l’étranger, ils sont parfois « citoyens européens » grâce aux passeports dorés qu’ils achètent à Chypre ou à Malte. Enfin, la complexité et l’opacité des montages financiers ne facilitent pas la lutte.

Que contiennent le Green New Deal et la nouvelle Politique agricole commune (Pac), en discussions, sur ce sujet ?

La Commission européenne d’Ursula von der Leyen procurera sans doute des instruments qui aideront. Il y a notamment des objectifs contraignants de restauration de la nature dans la Stratégie en faveur de la biodiversité d’ici à 2030. Elle sera sans doute plus efficace que les aides au premier hectare, cette nouvelle mesure de la Pac qui était censée éviter la concentration des terres et que des investisseurs ont réussi à contourner.

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