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Practices and challenges of land tenure security around Lake Fitri

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Date of publication: 
décembre 2019
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Au cœur du Sahel tchadien à 12° 50’ N et 17° 30’ E, le lac Fitri est considéré comme « le lac Tchad en miniature » (Gillet, 1962 ; Caterina et Marzio, 2005). Très variable, cet hydrosystème endoréique est principalement alimenté par le bahr1 Batha, un tributaire temporaire qui prend sa source à l’est dans le massif du Ouaddaï à plus de 600 km. De faible profondeur (1,5 à 3 m), sa superficie et son niveau sont très sensibles aux variations climatiques saisonnières et à la pluviométrie irrégulière. L’étendue du lac Fitri oscille entre 220 km2 et 420 kmpendant l’étiage et entre 1 300 km2 et plus de 1 700 kmpendant la crue, avec une moyenne de 800 km2 (Lemoalle, 1989 ; Courel et al., 1997 ; Yalikun et al., ce volume). Les apports annuels, qui assurent sa pérennité, sont estimés à plus d’un milliard de m3. Au cours des années particulièrement sèches (1901, 1913, 1973 et 1984), le lac se réduit à de nombreuses mares ou disparaît complètement (Biep2, 1989 ; Dagou et al., 2005 ; P-Sidrat3, 2013).

2Zone refuge par excellence, le lac Fitri assure, par ses multiples ressources (eau, poisson, pâturages, terres agricoles, bois), un rôle vital pour les populations riveraines. Cette zone humide fait partie intégrante d’un ancien royaume qui a gardé son fonctionnement très structuré autour d’un pouvoir central. Les ressources naturelles, dont le foncier, sont gérées par ce pouvoir. Au Tchad, si la terre appartient à l’État d’après la législation foncière en vigueur (lois 23, 24, 25 du 22 juillet 1967), elle est au lac Fitri une propriété lignagère dont la gestion, acquise par droit de conquête au xvie siècle, est placée sous le contrôle du sultan et ses relais au Fitri (Zeltner, 1980 ; Zakinet, 2015). Cependant, la pression démographique ainsi que l’installation récente de nouveaux acteurs (préfet, sous-préfet, gendarmerie) dans le cadre des réformes administratives viennent bouleverser le système foncier coutumier en place. Ces nouveaux acteurs sont vus par les autorités coutumières et la population comme une menace pour l’ordre traditionnel. Dans un contexte où les pratiques agraires s’adaptent à la variabilité saisonnière du milieu, les modes d’accès et de réglementation coutumière du foncier ne sont-ils pas devenus inadaptés face à la pression foncière et à la multiplication des instances de gestion ?

3Ce travail repose sur des enquêtes de terrain (70 entretiens individuels et collectifs) réalisées en deux phases (février-mars 2015 et juin 2016) dans quinze villages riverains et insulaires du lac Fitri. Les entretiens ont concerné les autorités locales (traditionnelles et administratives), les agents des services déconcentrés de l’État et la population. Le présent article expose les principaux résultats à travers l’analyse des pratiques foncières en lien avec l’organisation et l’occupation traditionnelle de l’espace d’une part et les enjeux actuels de la gestion foncière d’autre part.

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